par Jacky Barozzi 28 juillet 2025
« My Father's Son » de Qiu Sheng, avec Weichen Luo, Anke Sun et Song Yang. Face à l’élégance formelle du film et physique de ses comédiens, j’ai cru que j’avais affaire à un film japonais ! Non, non, c’est bien d’un film chinois dont il s’agit, dans toute sa modernité urbaine et technologique. Une singularité dans la nouvelle production de ce pays dont les films évoquent généralement une réalité plus sombre, plombée et capitalistiquement post industrielle. Avec ce long métrage de fiction, Qiu Sheng parvient à renouveler l’éternel thème de la relation père-fils, sur le mode du temps passé, présent et avenir. Un conte intimiste, cru, délicat et sensible, où le réalisateur a mis beaucoup de sa personne en déroulant sous nos yeux et entendre à nos oreilles une subtile narration en mots, sons et images. C’est l’histoire d’une transmission de père en fils et du basculement de la paternité : à quel moment le fils devient-il le père de son père et le père le fils de son fils ? « Qiao, 18 ans, vient de terminer ses examens d’entrée à l’université lorsqu’il apprend la mort de son père, un homme brutal et secret, qui lui a légué sa passion pour la boxe. » Peu de temps auparavant, visitant un musée de l'évolution animale, le fils avait demandé à son père sous quelle forme les ex hommes-singes d’hier allaient-ils se transformer dans l’avenir ? Le père lui avait alors promis qu’ils assisteraient ensemble à la prochaine mutation de l’espèce humaine. C’est ainsi que, plus tard, devenu ingénieur, Qiao parviendra, grâce à l’intelligence artificielle, à développer un logiciel d’entraînement de boxe et à modéliser un adversaire virtuel reprenant traits pour traits l’apparence de son propre père. Prétexte à leur offrir un combat posthume et futuriste sous forme de retrouvailles. Troublante et universelle perspective pour tous les futurs enfants à venir… https://www.youtube.com/watch?v=Ds2atcod-Nw
par Jacky Barozzi 26 juillet 2025
« Sorry, Baby » de la réalisatrice Eva Victor, avec Eva Victor, Naomi Ackie et Lucas Hedges. Agnès (Eva Victor), une distinguée prof d’université, spécialiste de la littérature américaine du XXe siècle, a été abusée par son directeur de thèse. Elle s’en ouvre auprès de sa meilleure amie et ex coloc, Lydie (Naomi Ackie ), une black lesbienne new yorkaise, mariée avec une autre femme, et qui vient juste d’accoucher d’un bébé, obtenu de manière « assistée ». C’est dans l’air du temps et traité non sans humour, par une sous Woody Allen au féminin. Un film wokiste féministe parfaite convenu, adulé par la critique, et qui m’a passablement… ennuyé. Ici, au pays de la sororité parfaite, les méchants sont des violeurs potentiels et les gentils ont de petits zizis (Lucas Hedges) ! https://www.youtube.com/watch?v=PwOjS-Pvrd8 
par Jacky Barozzi 20 juillet 2025
« Les Filles désir » de Prïncia Car, avec Housam Mohamed, Leïa Haïchour et Lou Anna Hamon. Un premier long métrage, présenté à la Quinzaine des cinéastes à Cannes 2025 et jouissant d’un accueil chaleureux de la presse professionnelle et du public. Allons voir ! Omar et son équipe animent avec dévouement un centre aéré d’un quartier populaire de Marseille, Face à eux, un groupe de cailleras touche les dividendes de jeunes filles qu’ils ont mises au tapin. Curieusement, pas un brin de joint ne circule et il n’est point question de drogue ici. Parmi tous ces garçons, essentiellement blacks ou beurs, deux filles que tout oppose se distinguent, Carmen, la putain de service (mais non musulmane), et Yasmine, la maman programmée. Bad boys ou grands frères, tous les mâles du film se révèlent finalement partager un même instinct primaire et suprêmement machiste en matière de sexualité. Au point que contre toute vraisemblance et par un mouvement de sororité spontané, les deux héroïnes du film s’allient et partent en scooter (volé) sur le chemin de la liberté… Joué par des comédiens non professionnels, qui visiblement ont apporté leurs propres dialogues (ils sont tous crédités au scénario) et emporté par un sympathique élan de féminisme (de pacotille, hélas !), ce film qui se voudrait réaliste, sonne terriblement immature, dans tous les sens du terme. Juste un clip clinquant et inabouti en illustration d’un mauvais rap… https://www.youtube.com/watch?v=SLuJUQ1Ku_Y
par Jacky Barozzi 17 juillet 2025
« Le Rire et le couteau » de Pedro Pinho, avec Sérgio Coragem, Cleo Diára et Jonathan Guilherme. Entre fiction et documentaire, ce 5e long métrage du cinéaste portugais Pedro Pinho a été projeté au dernier Festival de Cannes dans la section « Un certain regard » et y a été récompensé du prix d’interprétation féminine. En voilà en effet un film qui décoiffe et ne ressemble en rien aux productions habituelles ! Prévenons le spectateur qui assiste à la projection de « Le Rire et le couteau » qu’il s’embarque pour une Odyssée contemporaine de plus de 3 h 30. Il y suivra les errances de Sergio, un ingénieur venu en mission pour étudier les travaux de construction d’une route entre brousse et forêt, pour le compte d'une ONG dans l'ancienne colonie portugaise de Guinée Bissau. Jeune trentenaire à la sexualité incertaine, il y fera la rencontre de Diára, une reine de la nuit locale, débrouillarde, perruquée et multi percée, et Guilherme, un travesti brésilien, poilu et moustachu, à la recherche de ses racines africaines (les acteurs et les personnages principaux du film ont le même prénom). C’est dire que le voyage géographique s’enrichit ici d’une dimension proprement ethnologique, politique, philosophique et économique, immergé au coeur d’un monde en pleine mutation. Englobant à peu près l’ensemble des problématiques actuelles, entre anciens et nouveaux colonisés, le voyage offert ainsi au public est tout à la fois transcontinental, transgenre, transrace, transculturel, transcultuel et transhumanitaire ! Un peu comme le fut en son temps, au début du XXe siècle, « La Montagne magique » de Thomas Mann. Un film ambitieux et détonnant dont on sort ravi et sonné mais plus intelligent ! https://www.youtube.com/watch?v=Ii_nHBOTong 
par Jacky Barozzi 15 juillet 2025
« Des Feux dans la Plaine » de Ji Zhang, avec Zhou Dongyu, Liu Haoran et Yuan Hong. Tout à la fois polar, film sociétal et romance, le premier long métrage de fiction du chef-opérateur Ji Zhang, est adapté d’une nouvelle de l’écrivain chinois Shuang Xuetao. Il nous conte l’histoire, en deux temps, 1997 et 2005, d’une série de meurtres de chauffeurs de taxi de Fentun, une ville industrielle du nord-est de la Chine, à l’époque de la mutation radicale du pays. Un monde violent où tandis que les usines dégraissent en masse et la criminalité explose, les deux protagonistes du film, un jeune policier et sa tendre voisine, tentent tant bien que mal de vivre leur passion amoureuse. Une histoire d'amour impossible, qui se révèlera bien plus noire que rose. C’est puissant, soutenu par un scénario complexe et porté par des acteurs inspirés. Un film qui m’a totalement convaincu, malgré l’accueil mitigé de la presse et du public ! A voir, pour se faire sa propre opinion… https://www.youtube.com/watch?v=mPoMI0R-LMA 
par Jacky Barozzi 8 juillet 2025
 Tricotage passionnel et ascensionnel « La Trilogie d’Oslo / Rêves » de Dag Johan Haugerud, avec Ella Øverbye, Ane Dahl Torp et Selome Emnetu. Récompensé de l’Ours d’or à la Berlinale 2025, « La Trilogie d’Oslo » du cinéaste norvégien Dag Johan Haugerud, sort sur nos écrans. « Rêves », en constitue le premier volet et sera suivi de « Amour » et « Désir ». Cela commence comme un film particulièrement littéraire, un teen movie conté en voix off par Johanne, une lycéenne de 17 ans, tombant amoureuse pour la première fois de sa vie de sa professeure intérimaire de français, une belle brune à la peau mâte, par ailleurs artiste émérite du tricot. Prétexte à notre héroïne pour s’introduire chez elle et partager en toute intimité son art sensible du tricotage. C’est ainsi que Johanne consigne le bouillonnement des émotions nouvelles et bouleversantes dont elle est la proie. Un journal intime, qu’elle fera finalement lire à sa grand-mère, poétesse, et à sa mère, qui au-delà du premier choc, y dénotent un réel potentiel littéraire. Et nous de même. A priori rien de bien neuf, sinon un ton singulier dans la narration, un montage subtil et des plans nombreux et soignés dans les escaliers publics et privés d’Oslo, ville-capitale dont on ne verra guère plus. Mais grâce à quoi nous assistons peu à peu à l’adaptation en live de la masse textuelle originelle en images sensibles, intelligentes et captivantes. Un film indéniablement plein de charme dont on attend avec impatience la suite… https://www.youtube.com/watch?v=IAeNTc0ewho
par Jacky Barozzi 4 juillet 2025
« L’Accident de piano » de Quentin Dupieux, avec Adèle Exarchopoulos, Jérôme Commandeur, Sandrine Kiberlain et Karim Leklou. Avant-hier, après 3/4 de projection de « L’Accident de piano » au UGC les Halles, panne électrique générale dans tous le Forum. Nous avons dû quitter précipitamment les lieux dans l’obscurité. Grande frustration à un moment capital du film… Résumé de l’histoire. Après un accident grave survenu sur le tournage d'une de ses vidéos, Magalie (étonnante Adèle Exarchopoulos dans le rôle d’une insupportable tête à claque) s'isole à la montagne avec Patrick (Jérôme Commandeur, son assistant personnel, tout à la fois veule et vénal). Jusqu'à l'arrivée d'une journaliste (Sandrine Kiberlain), qui la fait chanter pour obtenir la première interview de cette créatrice internationale de contenus de vidéos diffusés sur internet. Une star immature, passablement débile, mystérieuse et secrète, qui ne se nourrit que de yaourts nature et a fait néanmoins une immense fortune. Un scoop qui, malheureusement pour la journaliste, tourne court, au moment où l’on allait enfin en savoir plus sur ce fameux accident de piano. C’est alors que survint la panne… Hier, à l’issu de la projection des « Amants astronautes » de Marco Berger au MK2-Beaubourg (un mélo gai bavard et pas terrible), j’ai pu m’introduire dans la salle voisine où j’ai pu voir, pile poil, la fin de « L’Accident de piano ». Il aurait été triste de manquer ce dernier quart du film, où tout se précipite, se révèle et s’explique. C’est ainsi qu’il m’a été donné d’assister, dans un monde où une simple panne d’électricité peut tout paralyser, à l’oeuvre la plus nihiliste, au double sens du terme, de Quentin Dupieux. Une impitoyable évocation de nos sociétés post capitalistiques, où, sur les cendres des communismes soviétiques ou chinois et du moindre sentiment religieux, ne subsiste plus que la perspective de gagner du fric à tout prix. Ici, en guise d’admiration et d’amour, il n’est déjà plus proposé au public de followers décérébrés et déshumanisés que nous sommes, sur le modèle du « enrichissez-vous de Guizot, un unique « n’oubliez pas de vous abonner ! » Effrayant et totalement désenchantant. Nihiliste, vous dis-je. https://www.youtube.com/watch?v=WBVAEQ63I0E 
par Jacky Barozzi 26 juin 2025
« 13 jours 13 nuits » de Martin Bourboulon, avec Roschdy Zem, Lyna Khoudri et Sidse Babett Knudsen. Comment raconter l’histoire quand on ne fait pas partie des vainqueurs ? En se contentant de s’en tenir à un épisode héroïque dans la débâcle. Celui du commandant Mohamed Bida, le responsable militaire chargé d’évacuer le personnel et les centaines de réfugiés de l’Ambassade de France à Kaboul le 15 août 2021, au moment de l’arrivée dans la capitale et la prise du pouvoir des Talibans, suite au départ précipité des troupes américaines. Pas vraiment glorieux glorieux. Pas convaincu non plus par le film de guerre de Martin Bourboulon, qui n’était pas indispensable pour les carrières personnelles de Roschdy Zem et Lyna Khoudri, et, malgré un choix arbitraire de quelques centaines de réfugiés embarqués à nos côtés, parfaitement inutile s’agissant du sort des Afghans placés désormais sous le joug des Talibans… https://www.youtube.com/watch?v=OqSlnLsNfnA 
par Jacky Barozzi 26 juin 2025
« Amélie et la métaphysique des tubes » de Mailys Vallade et Liane-Cho Han, avec les voix de Loïse Charpentier, Victoria Grosbois et Isaac Schoumsky. Vu le dessin animé adapté du roman "La métaphysique des tubes" d'Amélie Nothomb (2000). Gentil, mignon. Comme échappé de la Bibliothèque rose. J’avais lu le roman, il y a bien longtemps et il m’avait paru moins mièvre, plutôt charmant. Présenté hors compétition au festival de Cannes, le film a remporté le grand prix du jury au festival d’Annecy. Public clairsemé dans la salle, composé exclusivement de femmes, plutôt jeunes ! Au milieu, je devais détonner... https://www.youtube.com/watch?v=JEgWF_v_gXw 
par Jacky Barozzi 22 juin 2025
« Avignon » de Johann Dionnet, avec Baptiste Lecaplain, Alison Wheeler, Lyes Salem, Elisa Erka, Rudy Milstein et Johann Dionnet. Une amusante et émouvante comédie entre le in et le off au Festival d’Avignon. Deux mondes qui généralement cohabitent mais ne se côtoient pas. Comme quoi, la lutte des classes existe aussi entre les nobles du théâtre subventionné et les prolétaires du théâtre privé… de moyens. Du répertoire classique à la pochade de café-théâtre ou au stand up, du sociétaire de la Comédie Française aux cachetonneurs de boulevard, la distance est souvent étroite entre les comédiens authentiques et les cabotins suffisants, qui ne sont pas toujours ceux auxquels on pense. La comédie de Johann Dionnet, acteur, réalisateur et scénariste de « Avignon », (le film), souligne les paradoxe d’un métier, avec ses passions et ses frustrations, et se veut aussi un hommage à Avignon (le Festival d’été), fondé en septembre 1947 par Jean Vilar. A noter que la 79e édition du Festival d’Avignon, désormais la plus importante manifestation de théâtre et de spectacle vivant du monde, par le nombre de créations et de spectateurs réunis, se tiendra du 5 au 26 juillet prochain. https://www.youtube.com/watch?v=T1yeqzM8tx8
Show More