Une saison au Martinez




   En 1968, j’avais 16 ans.

   Une vague nouvelle, partie de Nanterre, avait envahie le Quartier Latin, et fit ressentir son puissant ressac jusque sur nos paisibles rivages.

   Alors en classe de troisième à Carnot, je fus convoqué pour passer les épreuves du Brevet à Jules Ferry et ne pus me rendre à l’enterrement de ma chère grand-mère maternelle, Joséphine Dalmas, à Lucéram.

   Cette année-là, suite aux derniers événements, nous fûmes tous reçus !

   Dès lors, au lycée, il y eut un avant et un après Mai 68…

C’est alors que mon ami Jean-Rémy Daumas me proposa de venir le rejoindre à l’hôtel Martinez, où son beau-frère, qui y travaillait en tant que chef de rang, l’avait fait embaucher.

   J’acceptai avec enthousiasme.







   Oeuvre de l'architecte niçois Charles Palmero, l’hôtel Martinez, de style Art Déco, a été inauguré en février 1929 par son fondateur et propriétaire Emmanuel Martinez, un dirigeant italien d'hôtels de luxe.

   Il a été érigé à l’emplacement de la villa Marie-Thérèse, sise au 73, boulevard de la Croisette, que celui-ci avait racheté deux ans plus tôt, ainsi que le terrain attenant, à Alphonse de Bourbon-Siciles, prince royal des Deux-Siciles, né à Caserte en 1841 et mort à Cannes en 1934.

   Avec ses sept étages et sa façade d’une centaine de mètres, bordée de deux ailes, il était alors considéré comme le plus grand hôtel de la région.

   Plusieurs fois rénové par la suite et doté de 410 chambres dont 99 suites, Il est désormais la propriété du groupe qatari Constellation Hotels Holdings.







   C’est dans ce palace, dont l'architecte bordelais Pierre Veneuvot réalisa la décoration intérieure, que je fis mes premiers pas en tant que commis de bar.

   Des journées de 14 heures, 7 jours sur sept, deux mois durant.

   Nous devions assurer pas moins de trois services : depuis le petit-déjeuner, sur la grande terrasse ouvrant sur la Croisette, jusqu’à l’apéritf et aux cocktails du soir, qui nous conduisaient, aux sons des musiques lancinantes d’un orchestre professionnel, aux environs de minuit.

   Avec un intermède au déjeuner, où nous devions alors troquer notre tenue de pingouin, en noir & blanc et noeud pap’, pour un costume de marin, et regagner le restaurant de la plage.

   Une coupure de trois heures dans l’après-midi, me permettait de rentrer chez moi, sur mon vélosolex,     le temps de faire une sieste réparatrice et de prendre une douche fraîche puis de repartir à la charge.

   Notre travail consistait essentiellement à veiller à la mise en place de chacun des services, à nettoyer et remplir les ménagères : sel, poivre, moutarde, à servir et desservir les tables et ranger la salle et la terrasse.

   Je n’aimais pas ce travail, mais, ici, du moins on ne nous demandait pas de sourire aux clients, bien au contraire, et, avec Jean-Rémy, nous l’accomplissions à la manière d’acteurs de théâtres de boulevards, jouant les larbins obséquieux et serviles à la perfection, en rajoutant même un peu, au besoin.

   C’était très bien payé et nous étions intéressés aux pourboires, mis en commun et redistribués selon la hiérarchie professionnelle : maître-d’hôtel, chef-de-rang, demi-chef-de-rang, commis.

   De quoi me constituer un beau pactole, que je déposais sur mon livret de caisse d’épargne, et qui me permettait de m’habiller de neuf à la rentrée, de m’acheter des livres et des disques et d’aller au cinéma tout le reste de l’année.

   Un matin, je vis une longue silhouette noire, avec des lunettes de soleil fuselées, glisser très tôt sur la terrasse et aller s’assoir à une table isolée.

   Je reconnus l’une de mes chanteuses préférées : Barbara !

   J’allai aussitôt, d’un pas mesuré, à sa rencontre.

   Parvenu à sa hauteur, j’esquissai une amorce de révérence, et lui demandai, le visage et le ton le plus neutre possible : « Madame désire ? »

   Elle me commanda un thé au citron, des toasts grillés, du beurre, de la marmelade ainsi que… un oeuf en gelée !

   C’est ainsi que j’exigeai aussitôt à ma pauvre mère, médusée, de me servir désormais à la maison, des oeufs en gelée.






par Jacky Barozzi 23 novembre 2025
Mon immeuble s'est réveillé sous la neige. 18, bd Soult - 12e arr., 5 h du matin.
par Jacky Barozzi 20 novembre 2025
Bonjour tristesse à l’Hôtel de Ville ! A l’occasion du dixième anniversaire des attentats du 13 novembre 2015, un jardin en hommage à la mémoire des victimes vient d’être inauguré sur la place Saint-Gervais (4e arr.), au proche voisinage de l’Hôtel de Ville. Là, où s’élève devant la haute façade de l’église Saint-Gervais-Saint-Protais, un orme centenaire, présent et sans cesse renouvelé depuis le Moyen Âge, marquant symboliquement l’emplacement où la justice était jadis rendue. Ce nouveau jardin de 3 500 m2, plus minéral que végétal, s’organise autour de six grands blocs de granit bleu, symbolisant chacun les lieux des attentats : le Stade de France, Le Carillon / Le Petit Cambodge, La Bonne Bière / Le Casa Nostra, La Belle Équipe, Le Comptoir Voltaire et le Bataclan. Sur chaque bloc, sont gravées les noms des 132 victimes. Sans remettre en cause l’idée de trouver un site unique afin de rendre un hommage collectif à ces victimes, dont le nom figure déjà sur des plaques apposées devant chacun des lieux où les attentats se sont déroulés, on peut s’interroger sur l’opportunité de sanctuariser ainsi un espace géographique au coeur même de la capitale. Un enclos spécifique au cimetière du Père-Lachaise n’aurait-il pas mieux convenu ? Et pourquoi les seules victimes de cet attentat en particulier et non pas les nombreuses autres victimes d’attentats, des guerres civiles ou des divers combats de libération, qui ont ensanglanté l’histoire de la capitale ? A ce train-là, Paris tout entier ne serait plus qu’un vaste cimetière sous la lune !
par Jacky Barozzi 16 octobre 2025
Les impressions d'automne de Vita Née dans le Var le 26 septembre 2024, Vita s'est installée à son domicile parisien de la Porte Dorée (12e arr.) l'hiver suivant. Depuis, elle se livre à de longues promenades sportives dans le bois de Vincennes voisin, où elle jouit de pas moins de mille hectares de forêt ! Après le printemps et l'été, elle découvre, toujours avec autant de plaisir et d'étonnement son domaine à l'automne...
par Jacky Barozzi 10 octobre 2025
Le cimetière des gloires nationales Le 9 octobre, Robert Badinter, ancien ministre de la Justice de François Mitterrand, a fait son entrée au Panthéon. Sinon son corps, du moins son cercueil. Sa dépouille, quant à elle, demeure dans le carré juif du cimetière de Bagneux (Hauts-de-Seine), afin que son épouse, Élisabeth Badinter, puisse le rejoindre le moment venu. En guise de corps, cinq objets ont été déposés dans le cercueil : sa robe d’avocat, une copie de son discours sur l’abolition de la peine de mort et trois livres : Choses Vues de Victor Hugo, Condorcet : Un intellectuel en politique , ouvrage écrit en commun avec Élisabeth Badinter et Idiss , son livre écrit en hommage à sa grand-mère. Quand le corps n’est pas là, la « panthéonisation », plus symbolique que réelle, ne perd t-elle pas en grande partie son sens ? D’autant plus que ce n’est pas la première fois que l’on assiste à une entrée au Panthéon sans corps. Construit au XVIIIe siècle par décision de Louis XV en tant qu'église dédiée à sainte Geneviève et destinée à abriter les reliques de la sainte, le Panthéon fut transformé au début de la Révolution française (1789-1799) en un monument funéraire en l'honneur des grands personnages de l'histoire contemporaine, pour accueillir en premier lieu la dépouille du comte Honoré-Gabriel Riqueti de Mirabeau, mort en 1791 (il en sera retiré quelques mois plus tard à la suite de la découverte de sa correspondance secrète avec le Roi). D’autres personnalités, à peine admises, en ont également été retirées par la suite, tels Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, Auguste Marie Henri Picot de Dampierre et Jean-Paul Marat. Seuls deux illustres écrivains traverseront la période révolutionnaire : François Marie Arouet dit Voltaire entré au Panthéon en 1791, ainsi que Jean-Jacques Rousseau entré en 1794.
par Jacky Barozzi 15 septembre 2025
L’INNOCENTE Il y a des moments où Vita, parfaitement éveillée, reste sagement assise sur le canapé du salon, guettant de haut nos moindres faits et gestes. Elle habituellement si vive, toujours dans nos jambes à nous suivre dans toutes les pièces ou a nous apporter l’un de ses jouets favoris. C’est alors que l’on s’inquiète : « Qu’est-ce que tu as encore fait », lui demande t-on alors d’un ton ferme ? « Moi », semble t-elle répondre, d’un air innocent et comme surprise par notre question !!! Bon, pour cette fois-ci, c’est apparemment vrai, ainsi que nous avons pu le constater après une inspection minutieuse des moindres recoins de la maison…
par Jacky Barozzi 12 septembre 2025
Dix jours après son intervention chirurgicale du 2 septembre dernier, Vita a retrouvé toute sa vivacité ! Vita en toute intimité Contrôle positif de la vétérinaire, hier après-midi : les derniers points de suture tomberont d’eux-mêmes et la cicatrice n’est déjà plus qu’à peine visible. Entre temps, elle a perdu 200 grammes, qui ne correspondent pas exactement au poids des deux ovaires qui lui ont été retirés à l’occasion de sa stérilisation, mais à sa perte d’appétit au début de sa convalescence, passant ainsi de 4 kg à 3, 8 kg.
par Jacky Barozzi 2 septembre 2025
Vita dolorosa Entrée au cabinet vétérinaire à 9 heures ce mardi 2 septembre, Vita en est ressortie à 17 heures. Entre temps, ses deux ovaires lui ont été retirées sous anesthésie : adieu chaleurs, pertes sanglantes et perspectives d’enfantement ! Nous l’avons récupérée, encore groggy, après un long instant de réanimation. Pour l’heure, elle a une cicatrice de trois centimètres au niveau du nombril, protégée par un sparadrap et elle est entièrement emmitouflée dans une sorte de justaucorps élastique de ton chair, qui lui donne une allure de momie égyptienne. Contrôle dans deux jours et retrait définitif du pansement une semaine après. Avec juste un traitement anti douleur à lui administrer le matin, durant trois jours. Autant vous dire que Vita ne s’est pas fait prier pour retourner dare dare à la maison où elle a retrouvé son coussin avec plaisir… 
par Jacky Barozzi 17 août 2025
A l’occasion des actuels travaux de réaménagement de la place Félix-Éboué (12e arr.) ont été mis au jour d’anciens rails de l’avenue Daumesnil. D’émouvants vestiges « archéologiques » qui datent de l’époque où la STCRP (Société des transports en commun de la région parisienne) gérait les transports de voyageurs en surface dans l'ancien département de la Seine de 1921 à 1941.
par Jacky Barozzi 15 août 2025
Vita en été Née en septembre 2024, Vita découvre les plaisirs de la sieste, au centre du lit de ses deux humains adorés, dans la chambre fraîche aux volets clos...
par Jacky Barozzi 10 juillet 2025
Les jardinières de l’Hôtel de Ville Une nouvelle « forêt urbaine » a été aménagée et ouverte au public sur le parvis de la Mairie de Paris. Une forêt, croyez-vous ? « Mal nommer les choses c'est ajouter au malheur du monde » disait déjà Albert Camus. Disons, qu'ici, tout au plus, il s'agit de deux charmants bosquets ! Beaux et inattendus comme un double décor de cinéma, plus artificiel que naturel toutefois. Ces bosquets ont été créés en lisière de la Seine et de la rue de Rivoli, sur un peu plus du quart de la surface totale d’environ 9000m2 de l’ancienne place dont la partie centrale est restée quant à elle inchangée. Entièrement dallée de granit avec, en son centre, la représentation de la nef, emblème de Paris, celle-ci avait été réaménagée en 1982, à l’occasion du centenaire de la reconstruction de l’Hôtel de Ville.