Un séjour d'été en Dordogne.




« Quand j’ai compris que chaque matin je reverrais cette lumière,

Je ne pouvais croire à mon bonheur ! »

HENRI MATISSE


Nice entre parenthèses



   Le bac en poche et à la veille de m’envoler vers Paris, où j’étais parvenu à m’inscrire à la faculté de droit de la rue d’Assas, ma mère trouva le moyen de se faire renverser par un motocycliste. Souffrant d’un violent traumatisme crânien, elle fut transportée en urgence à l’hôpital de Cannes, m’obligeant à revoir mes plans de fond en comble et me replier en catastrophe sur la faculté voisine de Nice. Retardant ainsi mon rêve d’installation dans la capitale d’un an ! 



   Je trouvai via les petites-annonces « locations » de Nice-Matin, une studette donnant sur l’arrière d’un immeuble de la promenade des Anglais, sise au 105, Promenade des Anglais, et dont l’unique fenêtre ouvrait sur la cour intérieure, où trônait un majestueux palmier longiligne planté au milieu d’un parterre de fins graviers gris. 

   Une fois passé le porche et regagné mon petit studio, je tournais le dos à la mer. Peut importe, le bord de mer allait devenir le principal boulevard, que je sillonnerais jour et nuit : ma promenade idéale ! 

   Au début des années 1970, les facultés françaises étaient particulièrement florissantes. Créée sept ans plus tôt à l’emplacement des Jardins de la Villa Passiflores, sur la colline de Magnan, la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Nice était tout à la fois cossue et fonctionnelle, dotée d’un superbe auditorium de 650 places, de salles d'études spacieuses et aérées, et décorée de plus d’une splendide fresque de Chagall, en céramique multicolore, contant les aventures d’Ulysse, qui couvrait tout un long pan de mur du hall central.

   Tandis que la vaste cour de récréation, en terrasse, regardait la mer. 

   On disposait, entre autre, ici, d’une vaste bibliothèque avec cafeteria et d’un restaurant universitaire. 

   Certains cours de Droit nous étaient également dispensés dans la grande salle du CUM (Centre Universitaire Méditerranéen), un beau palais art déco du centre de la Promenade des Anglais, voisin du Negresco. 

   Je passais la journée à la fac, suivant les cours d’une oreille plus ou moins attentive, potassant à la bibliothèque, buvant un pot à la cafète avec les copains de la fac, garçons et filles joyeusement mêlés. 

   Le soir, rendu à ma solitude, je sillonnais de long en large, la promenade des Anglais, du côté plages, pénétrais dans les ruelles étroites de la Vieille Ville par le Cours Saleya, puis me sustentais d’une spécialité niçoise, attablé à la terrasse d’un bistro situé sur une placette au carrefour de voies piétonnes. 

    J’allais prendre ensuite le café sous les arcades de la place Garibaldi, celle par où entrèrent les travailleurs immigrés italiens, dont j’étais l’un des multiples rejetons, mâtiné du sang niçois de ma mère. 

   Le week-end, je ne rentrais pas à Cannes, arpentant inlassablement d’autres coins de la ville : la promenade du Château avec son vieux cimetière où repose Matisse, le quartier du Vieux-Port, la colline de Cimiez jusqu’aux ruines romaines, le quartier des russes orthodoxes de la colline Saint-Philippe, où se trouvait l’institution religieuse qui avait vu passer mes parents. 

   Au centre de l’avenue de la Victoire (aujourd’hui, avenue Jean-Médecin), je pouvais encore voir la granitique et imposante église dans laquelle ils s’étaient mariés, en septembre 1947. J’en possède toujours la photo, parmi d’autres vestiges photographiques conservés à ce jour, malgré mes nombreux déménagements ultérieurs et ma manie, à cette occasion, de me débarrasser de la plupart des documents, livres et vieux manuscrits accumulés au fil des ans.

   J’avais quitté ma mère à Cannes et je la retrouvais ici, à tous les coins de rues ! 

   J’allais aussi au cinéma, cinéma de quartier et ciné-club. 

   Le reste du temps, je lisais : cours, journaux, livres. 

   Je découvris les premiers romans de Patrick Modiano, qui me semblèrent adressés spécialement à moi par un grand frère déjà entré dans la carrière. 

   Devant la librairie de la rue de France, en grande partie piétonne jusqu’à la place Massena, de larges présentoirs offraient un grand choix de livres de poches, facile à piquer pour l'étudiant désargenté que j'étais. 

   C’est de cette manière que je fis la connaissance de l’œuvre et de la vie du marquis de Sade, des malheurs de sa pauvre Justine, et de sa philosophie de boudoirs. 

   Je lus aussi les romans de Genet et ne manquais jamais les films de Pasolini ou de Visconti. 

   Je ne parvenais plus à refouler mon homosexualité. 

   Auparavant, j’avais déjà eu quelques expériences, peu satisfaisantes. 

   À Nice, n’avais-je pas toute l’autonomie nécessaire pour donner libre cours à ma sexualité ? 

   Tard dans la soirée, la promenade des Anglais et ses plages, les Jardins Albert-1er, le Jardin Alsace-Lorraine, entre autres, se transformaient en autant de lieux de rencontre et d’échange privilégiés. 

   Les pratiques furtives marquèrent un temps de répit dans mon combat perpétuel contre la solitude dans laquelle je me débattais pour la première fois de ma vie. 

   À Nice, en rentrant de mes inlassables errances, personne ne m’attendait. 

   À la fin de l’année universitaire, je fus admis en deuxième année de licence en Droit mais pas de Science-économique.

   Peu m’importait alors le cursus universitaire.

   Le plus important pour moi était de mettre fin à cette parenthèse niçoise.

   J’avais vingt ans et je partis enfin à Paris ! 





D'un été l'autre : depuis une terrasse de Gassin face à la baie de Saint-Tropez.

par Jacky Barozzi 23 novembre 2025
Mon immeuble s'est réveillé sous la neige. 18, bd Soult - 12e arr., 5 h du matin.
par Jacky Barozzi 20 novembre 2025
Bonjour tristesse à l’Hôtel de Ville ! A l’occasion du dixième anniversaire des attentats du 13 novembre 2015, un jardin en hommage à la mémoire des victimes vient d’être inauguré sur la place Saint-Gervais (4e arr.), au proche voisinage de l’Hôtel de Ville. Là, où s’élève devant la haute façade de l’église Saint-Gervais-Saint-Protais, un orme centenaire, présent et sans cesse renouvelé depuis le Moyen Âge, marquant symboliquement l’emplacement où la justice était jadis rendue. Ce nouveau jardin de 3 500 m2, plus minéral que végétal, s’organise autour de six grands blocs de granit bleu, symbolisant chacun les lieux des attentats : le Stade de France, Le Carillon / Le Petit Cambodge, La Bonne Bière / Le Casa Nostra, La Belle Équipe, Le Comptoir Voltaire et le Bataclan. Sur chaque bloc, sont gravées les noms des 132 victimes. Sans remettre en cause l’idée de trouver un site unique afin de rendre un hommage collectif à ces victimes, dont le nom figure déjà sur des plaques apposées devant chacun des lieux où les attentats se sont déroulés, on peut s’interroger sur l’opportunité de sanctuariser ainsi un espace géographique au coeur même de la capitale. Un enclos spécifique au cimetière du Père-Lachaise n’aurait-il pas mieux convenu ? Et pourquoi les seules victimes de cet attentat en particulier et non pas les nombreuses autres victimes d’attentats, des guerres civiles ou des divers combats de libération, qui ont ensanglanté l’histoire de la capitale ? A ce train-là, Paris tout entier ne serait plus qu’un vaste cimetière sous la lune !
par Jacky Barozzi 16 octobre 2025
Les impressions d'automne de Vita Née dans le Var le 26 septembre 2024, Vita s'est installée à son domicile parisien de la Porte Dorée (12e arr.) l'hiver suivant. Depuis, elle se livre à de longues promenades sportives dans le bois de Vincennes voisin, où elle jouit de pas moins de mille hectares de forêt ! Après le printemps et l'été, elle découvre, toujours avec autant de plaisir et d'étonnement son domaine à l'automne...
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Le cimetière des gloires nationales Le 9 octobre, Robert Badinter, ancien ministre de la Justice de François Mitterrand, a fait son entrée au Panthéon. Sinon son corps, du moins son cercueil. Sa dépouille, quant à elle, demeure dans le carré juif du cimetière de Bagneux (Hauts-de-Seine), afin que son épouse, Élisabeth Badinter, puisse le rejoindre le moment venu. En guise de corps, cinq objets ont été déposés dans le cercueil : sa robe d’avocat, une copie de son discours sur l’abolition de la peine de mort et trois livres : Choses Vues de Victor Hugo, Condorcet : Un intellectuel en politique , ouvrage écrit en commun avec Élisabeth Badinter et Idiss , son livre écrit en hommage à sa grand-mère. Quand le corps n’est pas là, la « panthéonisation », plus symbolique que réelle, ne perd t-elle pas en grande partie son sens ? D’autant plus que ce n’est pas la première fois que l’on assiste à une entrée au Panthéon sans corps. Construit au XVIIIe siècle par décision de Louis XV en tant qu'église dédiée à sainte Geneviève et destinée à abriter les reliques de la sainte, le Panthéon fut transformé au début de la Révolution française (1789-1799) en un monument funéraire en l'honneur des grands personnages de l'histoire contemporaine, pour accueillir en premier lieu la dépouille du comte Honoré-Gabriel Riqueti de Mirabeau, mort en 1791 (il en sera retiré quelques mois plus tard à la suite de la découverte de sa correspondance secrète avec le Roi). D’autres personnalités, à peine admises, en ont également été retirées par la suite, tels Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, Auguste Marie Henri Picot de Dampierre et Jean-Paul Marat. Seuls deux illustres écrivains traverseront la période révolutionnaire : François Marie Arouet dit Voltaire entré au Panthéon en 1791, ainsi que Jean-Jacques Rousseau entré en 1794.
par Jacky Barozzi 15 septembre 2025
L’INNOCENTE Il y a des moments où Vita, parfaitement éveillée, reste sagement assise sur le canapé du salon, guettant de haut nos moindres faits et gestes. Elle habituellement si vive, toujours dans nos jambes à nous suivre dans toutes les pièces ou a nous apporter l’un de ses jouets favoris. C’est alors que l’on s’inquiète : « Qu’est-ce que tu as encore fait », lui demande t-on alors d’un ton ferme ? « Moi », semble t-elle répondre, d’un air innocent et comme surprise par notre question !!! Bon, pour cette fois-ci, c’est apparemment vrai, ainsi que nous avons pu le constater après une inspection minutieuse des moindres recoins de la maison…
par Jacky Barozzi 12 septembre 2025
Dix jours après son intervention chirurgicale du 2 septembre dernier, Vita a retrouvé toute sa vivacité ! Vita en toute intimité Contrôle positif de la vétérinaire, hier après-midi : les derniers points de suture tomberont d’eux-mêmes et la cicatrice n’est déjà plus qu’à peine visible. Entre temps, elle a perdu 200 grammes, qui ne correspondent pas exactement au poids des deux ovaires qui lui ont été retirés à l’occasion de sa stérilisation, mais à sa perte d’appétit au début de sa convalescence, passant ainsi de 4 kg à 3, 8 kg.
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Vita dolorosa Entrée au cabinet vétérinaire à 9 heures ce mardi 2 septembre, Vita en est ressortie à 17 heures. Entre temps, ses deux ovaires lui ont été retirées sous anesthésie : adieu chaleurs, pertes sanglantes et perspectives d’enfantement ! Nous l’avons récupérée, encore groggy, après un long instant de réanimation. Pour l’heure, elle a une cicatrice de trois centimètres au niveau du nombril, protégée par un sparadrap et elle est entièrement emmitouflée dans une sorte de justaucorps élastique de ton chair, qui lui donne une allure de momie égyptienne. Contrôle dans deux jours et retrait définitif du pansement une semaine après. Avec juste un traitement anti douleur à lui administrer le matin, durant trois jours. Autant vous dire que Vita ne s’est pas fait prier pour retourner dare dare à la maison où elle a retrouvé son coussin avec plaisir… 
par Jacky Barozzi 17 août 2025
A l’occasion des actuels travaux de réaménagement de la place Félix-Éboué (12e arr.) ont été mis au jour d’anciens rails de l’avenue Daumesnil. D’émouvants vestiges « archéologiques » qui datent de l’époque où la STCRP (Société des transports en commun de la région parisienne) gérait les transports de voyageurs en surface dans l'ancien département de la Seine de 1921 à 1941.
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Vita en été Née en septembre 2024, Vita découvre les plaisirs de la sieste, au centre du lit de ses deux humains adorés, dans la chambre fraîche aux volets clos...
par Jacky Barozzi 10 juillet 2025
Les jardinières de l’Hôtel de Ville Une nouvelle « forêt urbaine » a été aménagée et ouverte au public sur le parvis de la Mairie de Paris. Une forêt, croyez-vous ? « Mal nommer les choses c'est ajouter au malheur du monde » disait déjà Albert Camus. Disons, qu'ici, tout au plus, il s'agit de deux charmants bosquets ! Beaux et inattendus comme un double décor de cinéma, plus artificiel que naturel toutefois. Ces bosquets ont été créés en lisière de la Seine et de la rue de Rivoli, sur un peu plus du quart de la surface totale d’environ 9000m2 de l’ancienne place dont la partie centrale est restée quant à elle inchangée. Entièrement dallée de granit avec, en son centre, la représentation de la nef, emblème de Paris, celle-ci avait été réaménagée en 1982, à l’occasion du centenaire de la reconstruction de l’Hôtel de Ville.