
« Marco, l’énigme d’une vie », de Aitor Arregi et Jon Garaño, avec Eduard Fernández, Nathalie Poza et Chani Martín.
C’est l’histoire d’une imposture énorme, bien trop belle pour être inventée !
Un mensonge, devenu une véritable affaire d’État, qui permit néanmoins à une page généralement occultée de l’histoire espagnole d’entrer enfin dans la lumière.
Un scénario réel idéal, qui est déjà en soi toute une fiction.
Avec un personnage d’anti-héros fascinant, Enric Marco, président charismatique depuis une vingtaine d’années de l’association des victimes espagnoles de l’Holocauste, dont on découvrit en 2005, grâce à l’obstination d’un historien rigoureux (Benito Bermejo, c’est lui le véritable héros positif de cette histoire), qu’il n’a jamais été déporté au camp de Flossenbürg, contrairement à ce qu’il prétend.
Travailleur volontaire en Allemagne sous Franco, cet ancien mécanicien barcelonais, s’inventa dès les années vacillantes du franquisme, un passé plus glorieux aux côtés des 9 000 Espagnols déportés dans les camps de concentration nazis, dont environ deux tiers n’ont pas survécu.
Il s’agissait essentiellement de Républicains espagnols réfugiés en France à l’issue de la guerre d’Espagne, livrés par Vichy aux nazis et qui ne furent ni réclamés par Franco avant leur captivité ni accueillis en Espagne à leur libération.
C’est à leur cause qu'Enric Marco se consacrera avec brio et efficacité, obtenant même la présidence de la délégation espagnole parmi les nombreuses délégations européennes de victimes de l’holocauste lors d’une cérémonie internationale à Mauthausen en 2005 et la venue à cette occasion du premier ministre espagnol, José Luis Rodríguez Zapatero, membre du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE).
Une consécration personnelle pour Enric Marco dont il sera écarté in extrémis…
Les réalisateurs espagnols Aitor Arregi et Jon Garaño réussissent là un superbe film qui, à défaut de véritable suspens, maintient cependant tout du long une tension extrême : comment le piège lourd de conséquences va t-il se refermer sur notre mythomane ?
Un film, précis, complet, bien documenté, qui va au-delà du livre « L’Imposteur », le roman non fictionnel de l'écrivain espagnol Javier Cercas publié en 2014 et traduit en français en 2015 et porté par l’interprétation magistrale de Eduard Fernández dans le rôle de ce personnage qui, entre rêves et mensonges, tient tout à la fois de Don Quichotte et du matois Sancho Panza.
Viva España !
https://www.youtube.com/watch?v=X_sKJpXNm-8





